vendredi 21 juin 2024

DES TRAÎTRES DANS LA RÉSISTANCE



Ce que disent les dernières archives du Service Historique de la Défense sur la capture de Jean Moulin

DES TRAÎTRES DANS LA RÉSISTANCE - Un documentaire de Patrick Benquet - 2022

 

«  En mai 1943, Ernest Kaltenbrunner, nouveau chef à Berlin de l'Office central de la sécurité du Reich (RHSA) remet à Hitler un rapport qui décrit dans le détail l'organisation de la Résistance française.
Sous la forme d'une enquête historique qui s'appuie sur les archives inédites des services secrets français, ce film révèle comment la plupart des organisations de la Résistance ont été infiltrées par des français, appelés « V Man », hommes de confiance, à la solde des allemands.

L'ouverture récente de nouvelles archives des services secrets français conservées au Service Historique de la Défense (SHD) a révélé que durant la Seconde Guerre mondiale, la plupart des organisations de la résistance française ont été infiltrées par des traitres au service de l'occupant allemand. Peu connue l'existence de ces traitres, qu'il s'agisse de résistants arrêtés et « retournés » ou de français acceptant contre rémunérations de travailler pour l'ennemi, éclaire d'un jour totalement nouveau à la fois l'histoire de la répression allemande et celle de la résistance française.
Ce que l'on apprend à la lecture de ces archives jusqu'alors inaccessibles c'est que les Allemands ont érigé la trahison en véritable système. Le recrutement de Français prêts à les renseigner était une des priorités de l'occupant.
Ces français qui vont porter des coups fatals à la Résistance deviennent pour les Allemands des « V-man » (« hommes de confiance »).
Bien qu'il n'existe aucune statistique officielle du fait de la particularité de leur mission, les historiens estiment aujourd'hui que 20 à 30 000 Français ont aidé les Allemands à infiltrer les organisations de la Résistance. Une partie d'entre eux ont été de véritables agents secrets de l'ennemi, grassement rémunérés. Le bilan de leur trahison se chiffre en dizaines de milliers de résistants arrêtés, morts en déportation ou exécutés. La plupart des réseaux de la résistance ont été infiltrés et beaucoup totalement anéantis.
Comment tout cela a-t 'il été possible ? qui étaient ces traîtres ? Quelles étaient les méthodes utilisées par les allemands pour retourner ou recruter ces français ? Quelles étaient les motivations de ceux qui ont trahi ? Comment ont-ils infiltré les réseaux les anéantissant pour certains, causant des dommages considérables pour d'autres ? Et comment malgré cette lutte inégale et impitoyable, en dépit des nombreuses arrestations qui la touchèrent, la résistance réussit-elle à continuer de croître pour jouer un rôle fondamental dans la Libération de la France et la victoire sur l’occupant.
 » - Source LCP

 

Ce documentaire réalisé en 2022, enrichi d’archives inédites, déclassifiées sous la présidence Hollande, dévoile entre autres informations, des révélations inédites sur la capture de Jean Moulin en particulier le rôle joué par un certain Jean-André Multon. Résistant retourné, impliqué dans les multiples tentatives d’éliminations d’Henri Frenay, il était l’homme de confiance d’un des chefs du réseau Combat dans la zone Sud. Arrêté par la Gestapo à Marseille il entre dans l’engrenage de la trahison, contribuant à l’arrestation d’une centaine de ses compatriotes et participant même aux interrogatoires. Sur ordre du SS Dunker, il part à Lyon collaborer avec Klaus Barbie. Il prend rendez-vous le 26 Mai 1943 à Macon avec Henri Frenay, mais en instance de départ pour Londres, c’est sa secrétaire Mme Albrecht qui se présente au lieu indiqué. Arrêtée, écrouée à Fresnes elle mourra trois jours plus tard. Multon donne ensuite à Barbie l’adresse d’une boite aux lettres. Les occupants trouvent un courrier mentionnant un rendez-vous entre deux membres importants de la Résistance, René Hardy, responsable des sabotages ferroviaires pour le réseau Combat et Charles Delestraint chef militaire de l’Armée Secrète. Le 9 juin le général est capturé à la station de métro La Muette à Paris, toujours en présence de Multon. Torturé pendant cinquante heures, il est déporté à Dachau où il sera exécuté en avril 1945 avant l’arrivée des alliés. Quant à René Hardy qui a eu la malchance de prendre le même train que Multon, il est arrêté sur les indications de ce dernier et de Robert Moog, autre collaborateur, à Chalons sur Saône. Pris immédiatement en main et semble-t-il avec certains égards par Barbie qui espère toujours capturer Frenay, il est relâché par les occupants 10 jours avant les événements de Caluire, non sans avoir donné des informations sur des projets de sabotage ferroviaire. Mis sous surveillance (à son insu ?) par les sbires de Barbie, il est convoqué au dernier moment par les responsables du mouvement Combat, pour participer le 21 juin, à la demande de Jean Moulin, à une réunion dont l’objet est la désignation d’un nouveau chef de l’Armée Secrète. Ignorant l’arrestation de Hardy, ils demandent à ce dernier de se rendre à Caluire et de s’opposer aux exigences du mandataire de De Gaulle, craignant la confiscation de leur mouvement par le Chef de la France Libre. Au jour dit à Caluire les allemands capturent tous les participants à l’exception de René Hardy qui réussit à s’enfuir. La suite est connue. A la Libération Jean Multon, fut dénoncé par son ancien chef Henri Frenay en Mars 45, arrêté, jugé, condamné à mort et exécuté. Quant à René Hardy il fut acquitté deux fois par les tribunaux, malgré de lourdes présomptions de culpabilité. L’Histoire retiendra que les actions entreprises par les nazis pour éliminer le chef du mouvement de résistance Combat aboutiront accidentellement à l’arrestation et à la mort de Jean Moulin.

samedi 1 juin 2024

6 Juin 1944 - Le Jour Suprême


La France commémore cette année le cinquantième anniversaire (1) des événements historiques qui provoquèrent la libération de son territoire, la défaite du nazisme et le rétablissement de la liberté.

D'importantes cérémonies officielles se dérouleront le 6 juin sur les plages normandes du Calvados et de la Manche, notamment à Omaha Beach où débarquèrent les soldats américains le 6 juin 1944.

Après l'humiliante défaite de nos armées en 1940 et le magnifique comportement de l'aviation anglaise et de la population de Londres qui résistèrent aux bombardements de la Luftwaffe deux hommes surent entretenir l'espoir de leurs compatriotes et préparer la bataille décisive, Winston CHURCHILL et le Général DE GAULLE. Le 18 juin 1940 le Général DE GAULLE prend la parole à Londres ! "Rien n'est perdu parce que cette guerre est une guerre mondiale. Dans l'univers libre, des forces immenses n'ont pas encore donné. Un jour ces forces écraseront l'ennemi. Il faut que la France, ce jour-là, soit présente à la victoire. Alors, elle retrouvera sa liberté et sa grandeur ".

En vérité peu de français entendent cet appel et beaucoup accordent leur confiance au Maréchal PETAIN, le vainqueur de Verdun.

Mais, le nombre de ceux qui écoutent chaque soir l'émission de la BBC, " Les français parlent aux français " ne cesse de croître. Maurice SCHUMANN, Jean OBERLE et leurs collègues de la France Libre donnent à leurs auditeurs des informations que leur cache la radio de Vichy et encouragent les patriotes de l'ombre qui constituent l'embryon de la résistance.

Bientôt, des mouvements structurés diffusent des journaux : Libération Nord, Libération, Combat etc. Des officiers et sous-officiers d'active encadrent les volontaires des maquis de Haute-Savoie, du Vercors, de l'Ain, etc. Des réseaux, comme celui du Colonel Rémy auquel appartiennent des fonctionnaires des PTT, PRUVOST, chef de la résistance PTT, Simone LEVY qui sera exécutée en Allemagne, DEBAUMARCHE, Maurice HORVAIS, notre ami Henri LEVEILLE, fournissent à Londres de précieux renseignements sur les fortifications allemandes de Normandie et sur le déplacement des troupes ennemies. Jean MOULIN, nommé par le Général DE GAULLE, Président du Conseil national de la résistance (CNR) rassemble les mouvements de résistance en vue de coordonner leurs efforts, de préparer avec Londres et Alger l'insurrection nationale et d’élaborer un programme destiné à sauvegarder au lendemain de la libération l'idéal républicain. Arrêté en 1943 à Lyon par Klaus BARBIE, Jean MOULIN, meurt sans livrer les secrets qu'il détient.

Au cours de l'année 1943, les chefs de la résistance et l'Etat Major allemand savent que la bataille décisive aura lieu en France en 1944.

Après leurs victoires en Afrique et en Italie les armées alliées et françaises préparent leur débarquement en France. La Corse est le premier département français libéré en 1943 par l'action conjointe de la résistance et du corps expéditionnaire français constitué en partie de tabors marocains. Dans les autres départements les maquis augmentent leurs activités. Ils reçoivent davantage d'armes, surtout, hélas, des armes légères. Les allemands et la milice réagissent violemment contre les attaques des maquis, les sabotages des voies ferrées et des lignes téléphoniques. Pour éviter la création d'un front intérieur les allemands tentent de détruire les maquis importants.

En mars 1944 une unité de chasseurs alpins allemands puissamment soutenue par l'artillerie et l'aviation attaque le Plateau des Glières. Les miliciens et les GMR participent à l'opération qui oppose 467 patriotes retranchés sur le plateau enneigé à sept mille soldats aguerris et à leurs mercenaires. Nous avons rendu hommage dans le numéro précédent de notre journal au courage des patriotes des Glières qui avaient choisi pour devise " vivre libre ou mourir " et nous avons dénoncé la lâcheté et la cruauté des miliciens de DARNAND, d'AGOSTINI et de TOUVIER.

Une compagnie de la division SS Das Reich pendra 99 otages à Tulle et massacrera le 10 juin la population d’Oradour-sur-Glane en représailles contre les harcèlements des maquis de la Haute-Vienne qui retardent le mouvement des blindés attendus sur le front de Normandie.

Au mois de juillet, la Wehrmacht attaque de toutes parts le maquis du Vercors. CHABAL, adjudant de chasseurs alpins, fait Sidi Brahim, c'est-à-dire se sacrifie pour défendre la position de Valchevrière.

Le 22 juillet les SS, transportés en planeurs sur le plateau du Vercors, massacrent des patriotes et des civils à Vassieux et à la Chapelle en Vercors.

De même en Normandie les allemands exterminent les patriotes, notamment ceux du maquis de Beaucoudray.

Toutes ces activités des résistants et les violentes représailles des troupes d'occupation n'ont pas échappé à l'attention du Général EISENHOVER, le chef suprême des armées alliées qui eut le mérite de souligner 1’ importance du rôle joué par la résistance sur notre territoire. Aussi, on ne comprend pas, et on n'admet pas cette réflexion récente de Jacques ATTALI, ancien conseiller du Président MITTERRAND, selon laquelle tous les français étaient " Collabos ". Nous joignons nos protestations à celles des personnalités qui ont vivement réagi contre cette odieuse provocation.

Les pertes subies par les résistants et la population civile auraient été encore beaucoup plus élevées si l'Etat major allié n'avait décidé, après une longue et minutieuse préparation, de déclencher au mois de juin 1944 la gigantesque opération Overlord.

Le Général ROMMEL avait fait renforcer le mur de l'Atlantique construit par l'organisation Todt de Dunkerque à Royan et fait enfoncer dans les plages de Normandie des mines, des pieux en bois et des tétraèdres en fer pour ralentir la progression des blindés exposés au feu des bunkers.

Mais le Général ROMMEL pensait avec HITLER et son Etat Major que le débarquement aurait lieu en Picardie et les services du Général EISENHOVER entretenaient habilement cette illusion.

Le 2 juin 1944, les chefs des mouvements de résistance et les maquisards entendent avec une immense joie les trois premiers vers de la poésie de VERLAINE, "chanson d'automne " que diffuse la BBC et qui annoncent l'imminence du débarquement : " Les sanglots longs des violons de l'automne. " Et, le 5 juin, la BBC diffuse les trois vers qui fixent au lendemain la date du débarquement : "blessent mon cœur d’une langueur monotone ".

L'Etat-Major allemand s'inquiète mais il demeure persuadé que le débarquement aura lieu dans le Pas-de-Calais.

Dans la nuit du 5 au 6 juin 1944, plusieurs milliers de parachutistes sont largués derrière la ligne Maginot de l'Atlantique avec pour mission de détruire des ponts, des voies ferrées, de s'emparer de points stratégiques et de les tenir jusqu'à l'arrivée des renforts.

Deux de ces opérations spectaculaires se déroulent à Bénouville, près de Ouistreham, et à Ste-Mère-l ‘Eglise. Le Major HOWARD et ses hommes atterrissent en planeurs près du pont mobile de Bénouville, appelé ultérieurement Pegasus Bridge, en l'honneur du cheval mythique Pégase, emblème du commando anglais. Ils s'emparent du bunker qui défend le pont, s'introduisent dans les tranchées allemandes, repoussent une contre-attaque et ne perdent que trois hommes.

Le 6 juin, Lord LOVAT, précédé d'un joueur de cornemuse et suivi de ses bérets verts et des bérets verts français du capitaine KIEFFER vainqueurs à Ouistreham, assure la relève avec trois minutes de retard sur l'horaire prévu. D'autres parachutistes américains sont largués sur le Cotentin. Vers 22 h, une maison brûle à Ste-Mère-l ‘Eglise, éclairant la place et le ciel et, soudain, les habitants voient descendre des parachutistes mitraillés par les allemands. L'un d'eux restera quatre heures, accroché au clocher par le harnais de son parachute.

Sainte-Mère-l ‘Eglise que nous visiterons fut la première ville libérée.

Pendant la même nuit de durs combats se déroulent dans le bocage et les marais. Le 6 juin, à l'aube, les défenseurs allemands stupéfaits voient apparaître l'armada alliée qui obstrue l'horizon. Aussitôt, c'est l'enfer, la souffrance, la mort. Les navires de guerre qui escortent les milliers de transports de troupes et les milliers d'avion qui les protègent ouvrent le feu sur les bunkers qui ripostent. Sur les plages de Sword, Juno, Sold et Utah les opérations de débarquement font un minimum de morts. Mais les américains rencontrent de terribles difficultés sur la plage de Omaha car la plupart des bunkers et des nids de mitrailleuses n'ont pas été détruits. La première vague d'assaut est néantie par le feu des défenses ennemies. Les vagues suivantes sont à leur tour laquées sur le sable et durement éprouvées. Les chaloupes coulent, les tanks amphibies chavirent, la mer est rouge de sang, la plage couverte de cadavres et de débris de blindés et de véhicules. Plus de 2000 soldats américains seront tués] Finalement, au prix de lourdes pertes, les soldats du génie ouvrent une brèche dans les défenses allemandes. Mais ce n'est qu'en fin de journée que les survivants parviendront à Colleville-sur-Mer. Les rangers, eux aussi, perdront de nombreux soldats pour s'emparer de la pointe du hoc et résister à la contre-attaque allemande.

Toutefois, malgré la forte opposition des troupes allemandes, 170 000 soldats, américains, britanniques, canadiens et français franchissent les plages normandes le 6 juin. Dans les jours suivants, les combats acharnés se poursuivent dans le bocage et la plupart des agglomérations sont incendiées ou rasées par l'artillerie et l'aviation faisant de nombreuses victimes militaires et civiles.

Le centre de Coutances est écrasé par le bombardement allié du 6 juin qui fait 350 victimes. Le port de Cherbourg est détruit. Saint Lô et Lisieux sont dévorés par les flammes. La ville de Caen, qui ne sera libérée que le 8 juillet par les troupes du Général MONTGOMERY, subit pendant plusieurs jours un bombardement intensif qui abat la plupart des immeubles et fait des milliers de victimes. Les ports et les villes de Rouen et du Havre disparaissent sous les décombres. Le 14 juin, le Général DE GAULLE débarque à Courseulles-sur-Mer et prononce son premier discours à Bayeux libérée depuis le 8 juin. " La victoire que nous remporterons dit-il, sera la victoire de la liberté et la victoire de la France ".

La 2eme DB du Général LECLERC débarque le 29 juillet, participe à la réduction de la poche de Falaise et, avec l'accord du Général PATTON, le Capitaine DRONE fonce sur Paris où il entre le 23 août et assure la liaison avec les insurgés, commandés par le Colonel ROL-TANGUY. Le lendemain, le Général DE GAULLE descend les Champs Elysées, suivi de Georges BIDAULT, le nouveau Président du CNR et s'adresse à la foule d'un balcon de l'Hôtel de Ville.

Le 22 novembre, le Général LECLERC fidèle au serment de KOUFRA délivre Strasbourg. Toutes les autres villes françaises seront libérées pendant cette période, soit par la résistance, soit par l'action conjuguée de la résistance et de l'armée.

Mais il est indéniable que la bataille décisive s'est déroulée sur les plages de Normandie et dans l'arrière-pays. Comme jadis les populations du Nord et de l'Est de la France, la population de Normandie a terriblement souffert de la guerre et fait preuve d'un courage remarquable.

Comme la Jérusalem antique, la Normandie est sortie de ses ruines plus belle et plus rayonnante que jadis.

Au charme de ses villes, de ses plages, de son bocage s'ajoute maintenant dans ses musées, dans la pierre des édifices restaurés, dans les bunkers éventrés, dans les restes du port artificiel d'Arromanches un précieux témoignage historique, témoignage accablant contre la guerre.

 

Jeunes gens qui jouez sur les plages, qui visitez les champs de bataille, l'immense cimetière de Colleville-sur-Mer couvert de 85 000 croix blanches, le mémorial de Caen, les musées de Bayeux, d'Arromanches, pensez aux jeunes de votre âge qui ont sacrifié leur vie pour la France, pour la paix, pour la liberté.

Sachez que la paix, la liberté, les droits de l'Homme ne sont jamais définitivement acquis.

 

(1)   Article publié en Mai 1994 dans Notre voix PTT par René Peyre à l’occasion des cérémonies du cinquantième anniversaire du débarquement allié le 6 juin 1944


dimanche 21 avril 2024

IL Y A 80 ANS LES COMBATS DU VERCORS

 

Les forces de la résistance en Vercors en fixant d’importants effectifs allemands ont rendu d’éminents services à la bataille de France " en cours "

Télégramme adressé le 29 juillet 1944 aux FFI Vercors par le Général KOENIG.

 

 

D'une phrase très courte, Raoul BLANCHARD, ancien recteur de l'Académie le Grenoble, auteur d'une thèse sur les Alpes, dépeint le plateau du Vercors "Un vaste berceau de prairies au milieu des forêts "

 L'air y est pur. Loin du tumulte et de la pollution des grandes villes la nature conserve son charme et sa sérénité.

 Les habitants de La Chapelle-en-Vercors, de Vassieux, des hameaux voisins et les fermes isolées consacrent leur activité à l'élevage et à l'exploitation des forêts.

      En hiver montent sur le plateau des skieurs, au printemps et en été des randonneurs t des enfants qui ont besoin de respirer l'air pur et tonifiant des montagnes du Vercors.

       Aucun des habitants ne se doute en 1940 qu'il souffrira un jour de la barbarie nazie. Les derniers combats se sont déroulés à Voreppe (Isère) et dans les Alpes. La Fance est traumatisée par une défaite foudroyante. Deux millions de soldats sont prisonniers. Une partie de la population accorde sa confiance au vieux Maréchal PETAIN. Mais des femmes et des hommes de tous âges et de sensibilités différentes auxquels le Général DE GAULLE a lancé un appel pathétique le 18 juin 1940 refusent de vivre sous le joug hitlérien et la tutelle du gouvernement de Vichy. Ils espèrent pouvoir reprendre rapidement les armes pour chasser l'occupant et rétablir la République et nos libertés. Dans tous les départements, dans l'Ain, dans les Savoies, dans la Drôme, dans l'Isère, dans l'Ardèche, en Dordogne, dans le Massif Central, dans le Limousin, en Bretagne, en Normandie, en Ile-de-France, dans le Nord, en Corse... se constituent clandestinement des maquis rattachés à des mouvements ou réseaux en contact avec l'Etat-Major de la France Libre à Londres.

      En 1941, M. Pierre DALLOZ, inspecteur des sites, résidant à Sassenage, pense que le Vercors, forteresse naturelle d'accès difficile, constituerait une position stratégique très importante si les troupes alliées débarquaient en Provence.

      Son ami, l'écrivain Jean PREVOST, partage ce sentiment. En novembre 1942, Pierre LOZ soumet à Yves FARGES, journaliste à "Franc-Tireur", à Lyon, un plan d’utilisation militaire du Vercors supervisé par le capitaine LE RAY. Yves FARGES transmet le plan « montagnards " à Jean MOULIN qui donne son accord le 31 janvier 1943.

     Le 10 février 1943, Pierre DALLOZ et Yves FARGES remettent le plan « montagnards " au Général DELESTRAINT, chef de l'Armée secrète, qui l'adopte et le présente au Général DE GAULLE en mars 1943.

    Malheureusement, le Général DELESTRAINT et Jean MOULIN, dont l'insistance aurait sans doute été déterminante, sont arrêtés, l'un à Paris, l'autre à Lyon en juin 1943. La Gestapo les a éliminés.

  A la fin de l'année, Pierre DALLOZ rencontre à Alger le Colonel PASSY (chef BCRA) et le Colonel BILLOTTE, secrétaire général du Comité de défense national proches collaborateurs du Général DE GAULLE. II souligne l'intérêt de son plan dev deux autres colonels " dont les préoccupations, écrit-il, n'étaient pas celles que j'aurais cru »

   Quand Eugène CHAVANT (CLEMENT) se rend à son tour à Alger en Mai 1944 constate avec amertume que le plan "montagnards" n'a pas été transmis à l’état-major interallié.

    Mais il rencontre Jacques SOUSTELLE qui lui promet qu'Alger interviendrait si les Allemands lançaient une grande offensive contre le Vercors.

    Hélas la promesse ne fut pas tenue, et CLEMENT le reprochera très vivement aux autorités civiles et militaires d'Alger.

   Quoique plus modéré dans ses propos le Commandant HUET terminera ainsi le message transmis par radio le 23 juillet au soir à Alger : " Tous ont fait courageusement leur devoir dans une lutte désespérée et portent la tristesse d'avoir dû céder sous nombre et' d'avoir été abandonnés seuls au moment du combat ".

   L'attitude de l'Etat Major interallié est d'autant plus surprenante qu'il n'ignorait pas] l'existence et l'intérêt du maquis du Vercors constitué au début de l'année 1943 par un comité comprenant Pierre DALLOZ et ses amis et les responsables du mouvement Franc-Tireur du Dauphiné.

   Le premier maquis est créé à Ambel, au sud de la forêt de Lente en janvier 1943. Au fur et à mesure de l'arrivée de volontaires et de groupes constitués dans les vallées une dizaine de maquis s'installent dans les divers secteurs du Vercors.

   En 1943, le Vercors abritait environ 400 maquisards. En juin 1944, il en comptait environ 4 000. Pourtant, en raison de l'étendue du Massif, les effectifs étaient trop faibles pour contenir l'ennemi dans certains passages et constituer des réserves suffisantes. Comme aux Glières, les parachutages ne livraient aux résistants que des armes légères, des fusils mitrailleurs, des fusils et des mitraillettes Sten, quelques mitrailleuses, des grenades, des explosifs, des bombes Gamons. Pas de mortiers ni d'armes lourdes. De même " aucun moyen de transmissions militaires, pas de liaisons radio. Nos agents de liaison se déplaçaient à pied ou à vélo " écrit le Général COSTA de BEAUREGARD (DURIEU) dans le Figaro du 21 juillet dernier.

   En revanche, les officiers et sous-officiers d'active étaient vingt fois plus nombreux qu'au plateau des Glières.

   La plupart avaient servi au 6e Bataillon de Chasseurs Alpins de Grenoble, quelques-uns au 11 eme Régiment de Cuirassiers de Lyon. Enfin, avaient été parachutés sur le Vercors des officiers français, britanniques et américains chargés de missions spéciales par Alger ou Londres et un commando américain.

   En juin 1943, le second comité de combat du Vercors comprend : le capitaine LE RAY chef militaire, CHAVANT (CLEMENT), chef civil de la Résistance qui sera fait Compagnon de la Libération, le Dr SAMUEL, le Capitaine COSTA de BEAUREGARD et Jean PREVOST.

   Le premier parachutage a lieu le 13 novembre 1943 dans la zone d'Arbounouze. Les escarmouches s'accentuent au début de l'année 1944. Les maquisards harcèlent les Allemands et réussissent quelques coups de mains mais ils perdent des officiers et plusieurs hommes dans le combat de Malleval dont parle avec émotion l'Abbé PIERRE, ancien aumônier du groupe.

   En décembre 1943, le Capitaine LE RAY abandonne le commandement militaire du Vercors désormais rattaché à la région de Lyon.

   Le capitaine GEYER (THTVOLLET) lui succède provisoirement. Ancien Officier du 1161116 Régiment de Cuirassiers de Lyon, il a constitué avec Charles LAHMERY (BOZAMBO) et d'autres anciens de son régiment un maquis dans le secteur du Grand Serre et du camp de Chambarand en novembre 1942. Le Capitaine THTVOLLET arrive au Vercors en décembre 1943, à la demande du Commandant DESCOUR, chef régional de la résistance.

   Il est accompagné d'une quarantaine d'hommes.

   Le Capitaine BOZAMBO prend le commandement du maquis du Grand Serre et livrera de durs combats aux Allemands dans la Drôme des collines. II participera à la libération de Romans.

   En avril 1944, la milice investit Vassieux, fusille 3 résistants et des civils et incendie plusieurs maisons.

   Les miliciens sont commandés par d'AGOSTINI qui, au mois de mars précédent |traquait les patriotes descendus du plateau des Glières.

   Miliciens et Allemands voudraient écraser le maquis du Vercors dont ils redoutent la puissance au moment où les armées allemandes de Normandie tentent désespérément de retarder la progression des forces alliées et françaises.

    Quant aux maquisards, ils apprennent avec enthousiasme le débarquement du 6 juin souhaitent pouvoir chasser rapidement les Allemands du Dauphiné.

   Dans la nuit du 5 au 6 juin, la BBC diffuse le message attendu : " le chamois des Alpes bondit ". A partir du 6 juin 1944, des groupes de résistants rejoignent celui du grenoblois Vallier dans le Vercors.

 D'anciens soldats de l'armée française, maghrébins et sénégalais, encadrés par leurs officiers viennent en renfort au Vercors.

 Le 9 juin, le Commandant DESCOUR (BAYARD) donne l'ordre de mobilisation et installe son PC près de Saint-Julien-en-Vercors.

   Les événements vont se précipiter.

   Le 10 juin, sur ordre du Capitaine COSTA DE BEAUREGARD, la compagnie de l’AS de Jean PREVOST (GODERVILLE) renforcée par le groupe de Loulou BOUCHIER et la compagnie du Capitaine BRISAC (BELMONT) occupent la position de Saint-Nizier qui surplombe Grenoble et permet de suivre les déplacements des Allemands dans cette portion de la vallée de l'Isère.

   Naturellement, les Allemands voudraient s'emparer de cette position stratégique. Ils attaquent le 13 dans la matinée. Le combat dure 4 heures et tourne à l'avantage des maquisards grâce à l'intervention du Lieutenant CHABAL et de ses Chasseurs Alpins.

  Le 15 juin, à l'aube, les Allemands attaquent en force et, après de durs combats pénètrent à Saint-Nizier, pillent et incendient toutes les maisons, sauf un hôtel. Leurs pertes sont lourdes.

  Suit une période relativement calme.

   Le 3 juillet, la résistance diffuse une affiche qui annonce à la population que la République Française a été officiellement restaurée dans le Vercors. A dater de ce jour les décrets de Vichy sont abolis et toutes les lois républicaines remises en vigueur.

   Le 25 juin, et le 14 juillet dans la journée, des forteresses volantes lâchent plusieurs centaines de containers sur le terrain d'aviation de Vassieux, le " taille-crayon ".

Le groupe du Lieutenant HARDY et la population transportent et cachent les armes

Le Capitaine d'aviation TOURNISSA (PAQUEBOT) saute sur Vassieux, chargé par l’Etat-Major interallié d'Alger, d'aménager le terrain pour permettre l'atterrissage d'avions chargés de troupes et de matériel lourd. Les travaux doivent se terminer le 23 juillet. Mais le 21, les hommes qui travaillent sur le terrain, la population et les maquisards aperçoivent soudain des avions arrivant du Sud qui remorquent des planeurs. Ils croient tout d'abord que se sont les appareils annoncés par Alger. Fatale erreur, les planeurs déposent plus de 200 soldats, un commando spécialement entraîné pour la répression, des SS, des Waffen SS français et des mongols. Protégés par les mitrailleuses des pilotes, les Allemands attaque avec des lance-flammes, des fusils mitrailleurs, des mitraillettes et des grenades.

   Dès le début de l'engagement, les lieutenants GRIMAUD, HARDY et l'aspirant DESCOUR, fils du commandant DESCOUR sont tués ainsi que de nombreux soldats et civils. Des scènes horribles se déroulent à Vassieux. Comme de fauves, les assaillants massacrent la population, s'acharnent sur les blessés et les prisonniers, brûlent les maisons. Quand il apprend ce qui se passe à Vassieux le Commandant HUET (HERVIEUX) demande au Capitaine THIVOLLET d'envoyer| des renforts pour encercler les commandos Allemands.

    L'opération réussit mais trois attaques du maquis échouent. La situation devient] intenable. Des avions et des planeurs apportent encore des hommes, des armes lourdes et des munitions aux allemands.

    Pendant que Vassieux brûle, la 157eme Division de Montagne du Général PFLAUM, celui qui assaillait les Glières au mois de mars précédent, attaque avec de puissants moyens au nord et à l'est du Plateau du Vercors. A 15 heures, les Allemands montent en direction de Valchevrière mais le Lieutenant CHABAL les repousse. Sur les Pas (passages dans la crête orientale du Vercors) les Allemands progressent.

   A l'aube du 23 juillet, les Allemands tirent au mortier sur les positions de Valchevrière. Ils parviennent à s'infiltrer dans le système de défense du maquis.

   A Valchevrière, l'ennemi avance malgré l'héroïque défense des Chasseurs. Le lieutenant CIIABAL debout derrière les rondins empilés sur le belvédère de Valchevrière, tire au bazooka puis au fusil mitrailleur pour arrêter l'assaut de l'ennemi. Il donne même l'ordre de contre-attaquer mais l'ennemi poursuit son offensive. Alors le Lieutenant CHABAL fait porter le message suivant au Capitaine PREVOST :

   "Je suis presque complètement encerclé. Nous nous apprêtons à faire Sidi-Brahim. Vive la France". Il tire encore. Les hommes qui l'entourent sont tués ou grièvement blessés. Soudain, il s'affaisse. C'est fini. Le maquis du Vercors perd l'un de ses plus valeureux combattants.

  A Vassieux, à Valchevrière, sur les Pas les défenses craquent, l'ennemi se dirige, vers l'intérieur du plateau.

  Devant cette situation alarmante et ne recevant aucun secours d'Alger, le Commandant HUET (HERVIEUX) donne l'ordre de dispersion.

   Pendant que les patriotes du Vercors se replient en bon ordre dans les forêts en attendant de pouvoir reprendre le combat, les Allemands ratissent le plateau torturent, fusillent des civils innocents, pillent et détruisent les maisons. Ils commettent l'un de leurs crimes les plus odieux le 27 juillet dans la grotte de la Luire où ils massacrent les 24 blessés et s'emparent des médecins et des infirmières qui seront fusillés à Grenoble ou déportés dans les camps de concentration nazis.

   Jean PREVOST (Goderville) et les cinq résistants qui l'accompagnent sont tués le 1er août à Sassenage par une patrouille allemande.

   Au total, 500 résistants et 200 civils sont morts dans le Vercors. C'est un bilan 1res lourd mais la tragédie qui a plongé de nombreuses familles dans le deuil et la tristesse prend une valeur historique et symbolique.

   Pour le Commandant Pierre TANANT, Chef d'Etat Major, " le Vercors avec ses quatre milles combattants, avec ses sept cents martyrs, avec ses mille maisons brûlées, avec toute sa souffrance accumulée et généreusement acceptée, doit demeurer dans l'histoire de notre pays comme l'un des plus beaux symboles de la volonté de la Résistance Française ".

Au Vercors comme aux Glières, des Officiers et Sous-Officiers d'active, des adultes et des jeunes gens, qui croyaient ou ne croyaient pas en Dieu, ont risqué leur vie ensemble pour leur pays, pour la République et la liberté.

 Ces hommes qui ont rendu à la France son honneur, participèrent à la libération des villes du Dauphiné.

   Le 22 août, la Compagnie du Commandant THTVOLLET et celle du Capitaine BOZAMBO qui perd deux officiers libèrent Romans.

   Le lendemain, le Commandant HERVIEUX installe son PC à Grenoble libérée.

   Le 31 août, une compagnie du Vercors et la compagnie du Commandant PONS, qui avait brillamment défendu l'accès sud du Vercors et infligé une sévère défaite aux Allen à Espenel, libèrent Valence.

   Le 2 septembre, le Colonel DESCOUR entre le premier à Lyon avec ses hommes

   Dans toute la région, les anciens du Vercors traquent les Allemands refoulés pai Américains et la première armée de DE LATTRE DE TASSIGNY et font prisonnier| millier de soldats de la 157™* Division de Montagne, qui les avaient sauvagement atl quelques jours plus tôt.

   De nombreux résistants vont poursuivre le combat dans les rangs de la première armée de DE LATTRE DE TASSIGNY avec laquelle le contact s'est était à Grenoble.

   Le 21 juillet 1946, le Général DE LATTRE DE TASSIGNY se souvenant de ce contact rend hommage aux combattants du Vercors : " Grâce à eux, grâce à l'effort de leurs forces neuves, notre Armée réussit l'amalgame qui devait en faire un miracle d’unité spirituelle par la fusion de la mystique du maquis et de nos traditions militaires des plus vivantes "...

  " L'heure de notre délivrance a été hâtée par l'action de nos maquis.

  Par les destructions qu'ils ont causées à l'armée allemande, par les pertes considérables qu'ils lui ont infligées, par la psychose de peur que leur prétendu " terrorisme » entretenait dans les rangs ennemis, ils ont joué un rôle capital dans la réussite des plans gigantesques de débarquement mis en œuvre par les Nations Unies sur les côtes Normandie et de Provence ".

   Puissent les générations actuelles et futures ne pas l'oublier.


René Peyre Notre Voix PTT Septembre 1994

jeudi 18 avril 2024

Cinquantenaire de la disparition de Marcel Pagnol et Marcel Achard


Aujourd'hui nous célébrons le cinquantième anniversaire de la disparition de Marcel Pagnol. 1974 vit aussi le décès d'un de ses plus proches amis Marcel Achard, le 4 Septembre à Paris. L'INA a archivé un reportage de François Chalais sur le Festival de Cannes 1955 présidé par Pagnol. Outre les deux compères, étaient présents, entre autres, Georges Simenon et Alexandre Korda.
La vidéo montre les deux Marcel deviser et s'asseoir sur un banc. J'aime le mouvement de croisement de leurs jambes simultané, révélateur plus que tout autre discours, de leurs liens amicaux, de leur respect mutuel. Très anecdotiquement 1955 fut l'année de ma naissance. Que le Temps passe.

dimanche 7 avril 2024

Glières : les 80 ans des ultimes combats

 


Commémoration des Glières


17/01/2020

Bonsoir Monsieur,

 

La triste nouvelle que vous nous annoncez, de la disparition de votre père René Peyre, m’affecte particulièrement car il était un ami de mon père, Albert BARAT, membre lui aussi de l’ACVG PTT 74. Ils entretenaient d’excellentes relations et nous avions le plaisir d’accueillir votre père lors des cérémonies du souvenir à Annecy.

 

Au nom de tous ceux qui portent l’héritage des Glières et en mon nom propre, nous partageons votre peine, ainsi que celle de tous vos proches.

 

Veuillez agréer, Monsieur, l’expression de mes respectueux hommages et de mes sentiments attristés.

 

Serge BARAT

Secrétaire général

Association des Glières


mercredi 13 mars 2024

Mort de l'Amiral Philippe De Gaulle

 Article de Marion Cocquet pour le journal Le Point (13/03/2024)

© CHRISTOPHE ARCHAMBAULT / AFP


Un géant s'est éteint. L'amiral Philippe de Gaulle, fils du général de Gaulle, est mort dans la nuit du mardi au mercredi 13 mars, a fait savoir sa famille auprès de BFMTV. Il était âgé de 102 ans.

Nous sommes le 9 novembre 1970. À Colombey, le Général meurt d'une rupture d'anévrisme alors qu'il attend le journal télévisé et le repas du soir, assis près de sa femme dans son fauteuil de tous les jours. On prévient les amis et les enfants. Philippe, l'aîné, arrive le lendemain à La Boisserie. Il se recueille devant le corps, l'embrasse puis, avant de faire fermer le cercueil rustique apporté par le menuisier du village, il effleure l'arrière du crâne. Pour savoir, racontera-t-il, si son père et lui avaient bien le même méplat en haut de la nuque. Affirmatif.

 

C'est la première fois ce jour-là que « l'Amiral », à près de 50 ans, touche la tête de son père. On se caressait peu, dans la famille de Gaulle, pas plus en privé qu'en public. Ce que le grand Charles avait de mots doux et de douceur dans les gestes, il le réservait à Anne, sa fille trisomique morte à 20 ans dans ses bras. Philippe, lui, eut la confiance sans les effusions ainsi qu'une exceptionnelle ressemblance avec le grand Charles : mêmes paupières lourdes, même stature haute et droite, mêmes longs bras, même façon de les écarter un peu en parlant. Même méplat.

Philippe raconte cela dans Charles de Gaulle, mon père (Plon), écrit à 80 ans avec le journaliste Michel Tauriac. Quatre-vingts ans, l'âge du Général au moment de sa disparition. Il ne songe pas à se plaindre de ces froideurs, trop occupé à restaurer la légende dorée de son père. En faisant ce livre, il voulait, disait-il, « remettre les pendules à l'heure » et effacer les mauvais procès faits à de Gaulle : son antisémitisme supposé, sa volonté prétendue d'avoir voulu « brader » l'Algérie. Le résultat est une hagiographie qui rétablit des vérités mais gomme certains épisodes pourtant bien documentés (comme lorsqu'elle nie le bras de fer entre de Gaulle et Churchill, lors de l'appel du 18 juin).

C'est un formidable succès : plus de 500 000 exemplaires sont vendus de chacun des deux tomes. Un paradoxe, aussi. En défendant la statue du Commandeur, l'Amiral quitte enfin son ombre et devient un personnage public. Y trouve-t-il du plaisir ? On peut le supposer à le voir multiplier les plateaux télé, y compris les moins adaptés à sa gravité d'un autre âge.

« Je lui étais semblable, dans le petit »

Qu'a été sa vie, avant cela ? Il naît le 28 décembre 1921, à Paris. Élève au collège Stanislas, il dévore les romans de Paul Chack, officier de marine et écrivain (qui sera exécuté à la Libération pour avoir activement collaboré avec l'occupant nazi). Très vite, Philippe s'oriente vers une carrière militaire et entre en 1940 à l'École navale. Le 18 juin, il est en route vers Londres avec sa mère et ses s?urs et « manque » l'appel de son père. Il rejoint immédiatement les Forces françaises libres, débarque en Normandie parmi les premiers, participe à la sanglante bataille d'Alsace et à la libération de Paris. Il glane là ses premières médailles.

 

Vaillant, donc. Cela allait de soi. C'est lui qui doit rappeler ses faits d'armes à son père lorsque celui-ci rédige ses Mémoires de guerre. « Ah oui, c'est vrai », répond Charles, qui ajoute alors dans le manuscrit cette phrase, un brin laconique : « Mon fils continue de se battre avec la 2e DB. »

Après-guerre, Philippe poursuit sa carrière dans la marine, une arme pourtant hostile au Général et où on lui pardonne difficilement son ascendance. Il sera, toute sa vie, soupçonné d'avoir bénéficié de hautes protections. On l'appelle Sosthène, du nom d'un vicomte de La Rochefoucauld, piètre militaire et piètre politique, connu pour avoir allongé les robes des danseuses de l'Opéra et caché à coups d'emplâtre les nudités des statues. « J'aurais pu naître fils de Pygmée ou de Bantou, confiait-il au Figaro en 2003. Le sort en a décidé autrement. Il m'a beaucoup transmis. Je lui étais semblable, dans le petit » Philippe racontait aussi qu'un jour, tout de même, le général avait posé sa grande main sur la sienne et dit : « Je sais tout, vieux garçon. Ta position n'a jamais été facile. Ce n'est pas rien d'être le fils du général de Gaulle. Mais ton attitude a toujours été celle que j'attendais de toi. »


Video associée : https://www.dailymotion.com/video/x8ubik4



vendredi 23 février 2024

Ce que je n’ai pas eu le temps de dire à mon Père

 

Le 22 Janvier 1963 le Général De Gaulle et le Chancelier Konrad Adenauer signèrent un traité d'amitié franco-allemande dit « traité de l’Elysée ». Ce document fixait le cadre d’une coopération bilatérale avec le double objectif d’enterrer d’une part la hache de guerre à l’issue d’une période de soixante-dix ans marquée par trois conflits dont deux mondiaux, et d’autre part la volonté gaulliste d’en faire le moteur du bloc européen. Cette volonté politique s’inscrivait au sein d’une structure économique préexistante, la Communauté européenne du charbon et de l’acier (CECA) crée en 1951, remplacée par la CEE en 1957.

 

Dans la foulée du traité de l’Elysée, fut institué en 1963 l’Office franco-allemand pour la Jeunesse. René Peyre, alors chargé de mission au sein du cabinet du ministre des PTT Jacques Marette, organisa à partir de 1964 des rencontres de fils et filles de postiers français et allemands dont René Duclos repris le flambeau en 2009 à la tête de l’Association Nationale des PTT Anciens Combattants et Victimes de Guerre.

 

Le couple franco-allemand semble aujourd’hui tenir le coup, malgré quelques vicissitudes et le poids toujours plus grand d’un pays devenu en 2023 la troisième puissance économique mondiale. Sous l’influence des deux partenaires, l’Europe s’est agrandie et confortée à travers la création du Conseil européen en 1975, de l’élection du Parlement européen au suffrage universel direct en 1979 ou encore la signature du traité de Maastricht (1992) et la mise en circulation d’une monnaie unique, l’euro, en 2002. L’image forte du geste de Verdun le 22 septembre 1984 entre François Mitterrand et Helmut Kohl reste dans les mémoires.

 

On a pu craindre qu’une marche à pas forcés de la réconciliation franco-allemande suscite une lecture aseptisée du passé s’exerçant au détriment du devoir de mémoire. Le fort engagement de Madame Simone Veil pour la construction européenne et le discours historique de Jacques Chirac prononcé en 1995 lors des cérémonies commémorant la grande rafle du Vel’ d’Hiv’ des 16 et 17 juillet 1942 dissipent cette inquiétude. Par ailleurs René Peyre artisan du rapprochement entre les deux pays fut un des premiers à monter au créneau, lorsqu’à la tête de l’UFAC il s’opposa à la volonté du Président Giscard d’Estaing de ne plus célébrer l'anniversaire de la fin de la Seconde Guerre mondiale au profit d’une journée de l’Europe du 9 Mai.

 

Pour ma part, je fus l’humble témoin de la persistance de cette bilatéralité. J’ai effectué ma carrière au sein de l’opérateur historique des Télécommunications. Fin des années 90, début des années 2000, le secteur était alors en pleine effervescence entre bulle spéculative boursière, stratégies d’alliances et création d’un régulateur (ARCEP). Je fus intégré au sein d’une équipe projet de refonte du système informatique descriptif et productif des réseaux de transmission français. Ce vaste projet imposait avant tout choix d’une application unique, le préalable de la création d’un langage commun, et de la fiabilisation des données utilisées par les diverses applications régionales existantes. Ce travail effectué, vint le choix du produit final. Deux candidats s’opposaient. Une base de données hexagonale bien adaptée à la complexité de notre réseau alors – une fois n’est pas coutume ! - supérieur au réseau allemand. Et une application d’Outre Rhin inadaptée. A l’époque couraient des rumeurs de stratégies d’alliance avec Deutsch Telecom. Et contre toute attente l'option politique prévalut sur l'alternative technique. Salarié d’une entreprise autrefois « simple Direction Générale » du Ministère des P.T.T, je saluai, admiratif, dans cette décision, l’ombre portée de mon père, initiateur au sein de cette administration de la réconciliation franco-allemande.

 

Jean-Louis Peyre, retraité Orange.

 

 

Sources :

 

Le traité d'amitié franco-allemand – Wikipédia

 

La Communauté économique européenne – Jules Lastennet

 

Un anniversaire morose pour le couple franco-allemand – Le Monde Diplomatique - Anne-Cécile Robert

 

Biographie : Simone Veil, fervente avocate de la construction européenne – revue Toute l’Europe, comprendre l’Europe

 

Cahiers d’Histoire, revue critique - La réconciliation franco-allemande : crédibilité et exemplarité d’un « couple à toute épreuve » ? - Valérie Rosoux

 

René Peyre a été président de l’UFAC entre 1969 et 1996 et président de l’Association Nationale des PTT Anciens Combattants et Victimes de Guerre entre 1972 et 2009.


Post-scriptum : une version courte de cet article est parue dans le bulletin d'avril 2024 de l'UFAC :




samedi 8 juillet 2023

Léon Gauthier 1922 - 2023

 


Dernier membre vivant du commando Kieffer, cette unité d'élite française qui débarqua sur les plages de Normandie le 6 juin 1944, Léon Gauthier vient de décéder le 3 juillet 2023 à Caen. Apprenti carrossier, il avait intégré la marine à l'âge de 17 ans et rejoint les Forces Françaises Libres du Général de Gaulle.

L'exemplarité de son destin a été évoqué par le Président Macron lors de l'hommage national rendu à Ouistreham où l'ancien Fusillier marin avait élu résidence. M'est alors revenue en mémoire la séquence finale du film Il faut sauver le soldat Ryan, qu'affectionnait notre père. 

Avons nous tous eu, Français, une existence, un comportement, une solidarité qui justifièrent un tel sacrifice ? J'ai un doute.



lundi 8 mai 2023

Les 80 ans de la mort de Jean Moulin

 



Les lignes qui suivent sont extraites d’un article de René Peyre publié en Septembre 2002 dans le journal des anciens combattants PTT « Notre voix ». Intitulé « Destin » il relatait la publication d’un livre d’entretien de Laure Adler avec Pierre de Benouville sur son parcours et ses années de résistance. René Peyre en fait une lecture critique et aborde le chapitre dramatique de l’arrestation de Jean Moulin le 21 Juin 1943 par les troupes de Barbie.

  

 … A Lyon, capitale de la résistance, l'étau se resserrait autour des dirigeants de l'armée secrète (AS).

La Gestapo et la milice procédaient à de nombreuses arrestations e| recherchaient MAX (Jean MOULIN).

 Le Général DELESTRAINT promu chef d'Etat major de l'AS voulu rencontrer à Paris René HARDY responsable du sabotage ferroviaire.

 Henri AUBRY chef d'Etat major adjoint écrivit en clair à HARDY (DIDOT) e fit déposer la correspondance dans une boîte aux lettres qu'il savait surveillée par les allemands.

 Son imprudence, ou sa trahison, provoqua une cascade d'événements graves : l'arrestation de HARDY en gare de Chalon-sur-Saône, celle du Général DELESTRAINT à Paris et celle des résistants réunis à Caluire.

 Apprenant l'arrestation du Général DELESTRAINT, Jean MOULIN décida de convoquer rapidement une réunion pour désigner son remplaçant. La réunion eut lieu le 21 juin 1944 à Caluire dans la villa du Dr DUGOUJON.

 Cette villa ne comportait aucune issue de secours. D'autre part, les organisateurs n'estimèrent pas nécessaire d'assurer la protection de la réunion. C'est tout de même surprenant !

 Réunion prévue à 14H30.

 AUBRY, HARDY et LASSAGNE arrivent à 14H20. Jean MOULIN, Raymond AUBRAC et CHWARTZFELD n'arrivent qu'à 15 heures.

 Cinq minutes plus tard, BARBIE et ses hommes pénètrent dans la villa et arrêtent tous les résistants, sauf René HARDY, qui parvient à s'enfuir d'une manière rocambolesque, il est vrai !

 BARBIE a réussi son coup de filet. L'AS est décapitée. Il sait que parmi les prisonniers se trouve Jean MOULIN (MAX), le représentant du Général DE GAULLE en France. La résistance accuse le coup et prend immédiatement les dispositions nécessaires pour limiter les conséquences de l'opération de Caluire. Tous les prisonniers, sauf HARDY, sont transférés dans les locaux de l'école de santé militaire de Lyon, avenue Berthelot, siège de la Gestapo. Dans les caves, sous la torture, les interrogatoires commencent.

 Ladislas DE HOYOS, dans son livre « BARBIE » se réfère au souvenir de Raymond AUBRAC : « J'ai vu AUBRY dans la cour de Montluc, torse nu, il était noir de coups. Il m'a dit : J'ai été battu, j'ai parlé ! ».

 Pierre PEAN dans « Vies et morts de Jean MOULIN » écrit : « Depuis le 27 Juin, MISSELWITZ a pris en charge Henri AUBRY. Au bout d'une semaine, grâce à AUBRY, il connaît tout ou presque tout de ce qui s'est passé à Caluire, tout de l’armée secrète, tout des MUR (Mouvements Unis de Résistance), tout de « Combat ». AUBRY crache tout ce qu'il sait sur la résistance ». Jacques BAUMEL son livre « Résister »: «Quand les nazis ont arrêté nos camarades, ils ne savaient pas lequel était MOULIN.  Ils se sont affreusement acharnés sur LASSAGNE qu'ils avaient d'abord pris pour le délégué du Général DE GAULLE. Puis est venu le tour d'Henri AUBRY qui, lui aussi, aura été épouvantablement martyrisé. Il semble établi aujourd'hui que c'est lui qui a désigné MOULIN à ses bourreaux ».

 AUBRY fut libéré en Novembre 43.

 Ladislas DE HOYOS dans son livre « BARBIE » cite ce témoignage de Christian PINEAU chargé par les allemands de raser MOULIN dans la cour de la prison du fort Montluc à Lyon : « MAX a perdu connaissance, ses yeux sont creusés comme si on les avait enfoncés dans sa tête, je me penche sur MAX, celui-ci prononce cinq ou six mots en anglais que je ne comprends pas ».

 Christian PINEAU m'a décrit cette scène et je me suis posé la question pourquoi Jean MOULIN s'exprimait-il en anglais plutôt qu'en français, ne voulait-il pas faire passer un message, donner une piste ?

 Quoi qu'il en soit, après les interrogatoires de BARBIE à Lyon, les prisonniers vont subir les interrogatoires des agents d'Oberg et de Knochen dans les servie la Gestapo avenue Foch à Paris, sauf HARDY en cavale et AUBRAC maintenu dans la prison Montluc à Lyon d'où il s'évadera au cours d'une opération montée par Lucie AUBRAC et quatorze hommes des groupes francs.

 Un autre résistant arrêté à Caluire, Bruno LARAT, durement interrogé à Lyon est déporté dans le camps de Dora où il meurt d'une pneumonie en avril 44. Transféré à Paris en voiture en raison de son état de santé, Jean MOULIN meurt le 8 juillet 43 dans le train qui le conduit en Allemagne.

 Evidemment, au lendemain du drame de Caluire, les chefs de la résistai recherchent le traître qui a livré leurs camarades à la gestapo. Pierre PEAN écrit dans son livre « Vies et morts de Jean MOULIN » : « Dans le camp des amis collaborateurs de Jean MOULIN et autour de Lucie AUBRAC on est persuadé que le traître de Caluire n'est autre que René HARDY ». Lucie AUBRAC est même chargée de l'empoisonner en lui faisant parvenir un petit pot de confiture agrémenté de cyanure.

 Ecoutons Jacques BAYNAC auteur du livre « Les secrets de l'affaire Jean MOULIN » : « Le 21 c'est sur les pas de Jean MOULIN, dans les cinq minutes suivent son entrée chez le docteur DUGOUJON que BARBIE et ses hommes font irruption. S'ils y étaient arrivés en filant HARDY ils auraient surgi quarante minutes plus tôt et MOULIN alerté par le remue-ménage, les voitures, les gardes armés, les badauds attroupés, aurait passé son chemin ». Cela paraît évident.

 René HARDY a comparu deux fois devant un tribunal. Deux fois il a été acquitté. J'ai assisté aux deux procès. René HARDY était défendu par Maître Maurice GARÇON un des ténors du barreau de l'époque. Au cours du deuxième procès Maître Maurice GARÇON a vivement interpellé un témoin, Mme DELETRAZ.

 Mme DELETRAZ a prétendu que BARBIE lui avait demandé de suivre HARDY et qu'elle avait tenté de prévenir la résistance. Pierre PEAN parlant de cet agent double écrit : « Elle avait déjà prouvé son dévouement à Klaus BARBIE et à son amant MOOG, agent de la Gestapo, en permettant l'arrestation à Mâcon de Bertie ALBRECHT, l'adjointe et l'amie d'Henri FRENAY le chef du mouvement « Combat ». Quelques jours auparavant, Bertie ALBRECHT et Henri FRENAY séjournaient à Cluny chez M. et Mme GOUZE futurs beaux-parents de Francois MITTERRAND.

 Jacques BAUMEL, Secrétaire Général des MUR nourrit la plus grande admiration pour Bertie ALBRECHT arrêtée le 28 mai 1943 à Mâcon, inhumée au cimetière de Fresnes le 7 juin 1943.

Bertie ALBRECHT écrit-il « l'une des plus pures héroïnes de la résistance » croix de la libération à titre posthume « a probablement eu le tort de mourir. La postérité aime assez les grands témoins encore vivants, dont on fait des idoles qui vont dans les écoles et sur les plateaux de télévision ».

Revenons au drame de Caluire.

HARDY est-il un traître ou plutôt un bouc émissaire ? En l'accusant voulait-t' on, veut-on encore protéger une personne ou un groupe de personnes ? Ne disait-il pas : « J'ai été cocu dans cette affaire ? ».

 Pierre de BENOUVILLE a témoigné en faveur de son ami René HARDY au cours des deux procès. Il l'a protégé jusqu'à sa mort. Mais il lui a reproché d'avoir écrit dans son livre « Derniers mots » qu'il l'avait prévenu de son arrestation. C'est surprenant. D'autant plus que Pierre PEAN écrit dans « Les diaboliques de Caluire » : BENOUVILLE savait fort bien que HARDY avait été arrêté par les allemands dans train de Paris dans la nuit du 7 au 8 juin 43, ainsi qu'il m'en a lui-même fait plusieurs fois la confidence ». C'est un témoignage irréfragable.

 Pierre de BENOUVILLE dira à Laure ADLER : « J'ai la preuve que HARDY n'a pas trahi ». C'est dommage qu'il n'ait pas jugé opportun de donner cette preuve avant de mourir.

 Le téléfilm d'Yves BOISSET proposé sur la 2eme chaîne de télévision le 16 juillet dernier m'a déçu. Il n'apporte aucun élément nouveau et ne respecte pas la vérité historique. Le réalisateur montre MOOG, agent de la Gestapo qui suit HARDY dans les rues de Caluire. Il ne montre pas Mme DELETRAZ qui précédait les allemands. Quand on veut appeler l'attention de la population sur un événement historique, l'honnêteté intellectuelle exige que l'on vérifie ses sources et que l'on n’essaye pas d'escamoter la vérité. Le lendemain, dans le « Parisien » du 17 juillet un journaliste rendant compte de l'émission écrivait : « Le film fait état de trahisons qui ont vraiment existé et laissent entendre que d'anciens membres de la cagoule auraient aussi une responsabilité dans le drame ».

 Est-ce une autre piste ? Quel rôle a véritablement joué Lydie BASTIEN ?

 De très nombreux historiens et journalistes ont écrit des livres sur le drame de Caluire dans lesquels ils publient des documents, des interviews de BARBIE, du couple AUBRAC, de BENOUVILLE, du Dr DUGOUJON, de l'avocat VERGES, de Lydie BASTIEN. Lucie AUBRAC a fait condamner Gérard CHAUVY, qui dans son livre « AUBRAC » se posait des questions sur les évasions de Raymond AUBRAC à Lyon, et sur les contacts de Lucie AUBRAC avec Klaus BARBIE...

 Faut-il supposer que le drame de Caluire est la conséquence d'une trahison, d’une vengeance, d'un complot ? Faut-il croire René HARDY lorsqu'il écrit : « Il n'y a pas un coupable, je crois simplement que certains d'entre nous n'avaient pas pris de précautions suffisantes ». Le drame de Caluire restera sans doute une énigme et fera encore couler beaucoup d'encre. Quoi qu'il en soit j'espère que les jeunes générations se souviendront surtout de la valeur patriotique et militaire de la résistance et de l'héroïsme de Jean MOULIN auquel André MALRAUX a rendu un vif hommage le 19 décembre 1964 au moment du transfert de ses cendres au Panthéon » :

 « Aujourd'hui, jeunesse, puisses-tu penser à cet homme comme tu aurais approché tes mains de sa pauvre face informe du dernier jour, de ses lèvres qui n'avaient pas parlé, ce jour-là, elle était le visage de la France ».

 Puisse notre jeunesse s'inspirer du courage et du patriotisme de ceux qui risqué leur vie pour sauver la France et notre civilisation.